Présentation de l'ouvrage
Le maître spirituel Georges Ivanovitch Gurdjieff (1866-1949) naquit de parents d’origine grecque en Arménie. Quoique, de confession chrétienne orthodoxe, il accorde aux trois vertus théologales une place centrale dans son propre enseignement, c’est à la culture grecque de l’Antiquité qu’il fit le plus grand nombre d’emprunts, que ce soit à Homère (notion d’homme rusé, procédé littéraire de l’ekphrasis), à Pythagore (exercice du Stop, octave musicale, méthode pédagogique de la Quatrième voie), à Socrate (connaissance de soi), à Platon (mythe de l’Atlantide, rayon de création, notions de macrocosme et de microcosme, comparaison de l’homme à un attelage, figure de l’arbre inversé, symbole de l’Echelle), ou encore à Hermès Trismégiste (Table d’émeraude). Non sans s’inspirer également d’autres cultures comme celles de l’Egypte antique (pyramides ; Palette au taureau), de la Mésopotamie et de la Perse anciennes (ziggurats), de la Géorgie (chants et danses traditionnels, toasts), ou encore de la Turquie (danses des derviches tourneurs). Le présent ouvrage passe en revue la plupart de ces diverses sources culturelles de l’enseignement de Gurdjieff tout en insistant plus particulièrement sur le pythagorisme et le platonisme de ce maître majeur de l’Occident judéo-chrétien.
Patrick Négrier est un philosophe français né en 1956. Il découvre l’oeuvre de Gurdjieff en 1976. Durant les années 2005-2008 il rencontre à plusieurs reprises Solange Claustres (élève directe de G.) ; entretient une correspondance avec Paul Beekman Taylor (autre élève direct de G.) ; donne plusieurs séminaires sur l’ennéagramme de G. ainsi que sur l’Echelle gurdjievienne des Idiots ; et évoque l’œuvre de G. dans un film documentaire intitulé « La Tradition et la voie des maîtres », film réalisé par Franck Agier et par L. Schneider pour Baglis TV. Négrier a publié plusieurs ouvrages sur la voie maîtres parmi lesquels trois livres sur G. : Gurdjieff maître spirituel (L’Originel Charles Antoni 2005), Le Travail selon Gurdjieff (Ivoire-clair 2008), et L’Echelle des Idiots de Gurdjieff (Accarias 2017).
Titre : Gurdjieff et la voie des maîtres
Auteur : Patrick Négrier
Nb. pages: 384 pages
N° ISBN : 978-2-36353-124-7
Prix public : 24,90€
Poids : 410 g.
N°ISBN/ePub : N.A
Date édition : novembre 2020 - tirage limité
extrait de l'ouvrage
LA LOI DE TROIS
Gurdjieff symbolisa d’abord la « loi de Trois » dans l’ennéagramme sous la forme du triangle avant de la commenter lors de son enseignement oral rapporté par Ouspensky dans Fragments d’un enseignement inconnu, et de la décrire lui-même dans deux chapitres de ses Récits de Belzébuth à son petit-fils. Au chapitre 17 il appelle cette loi de Trois Triamazikamno (qui signifie en grec « je prends la peine de faire trois pains d’orge ») en précisant qu’elle se rapporte aux trois étapes successives de la dialectique « sainte affirmation », « sainte négation », et « sainte conciliation », dialectique dont il affirme au chapitre 39 qu’elle se trouve en correspondance avec chacune des trois personnes de la Trinité : le Père, le Fils et le Saint Esprit. Comment cela ? C’est ce que nous allons exposer ci-dessous.
La sainte affirmation
[Dans la foi en l’Esprit] Le premier réflexe de l’être humain est de s’affirmer en prenant l’initiative de désirer des objets extérieurs en vue de satisfaire ses besoins élémentaires de nourriture et de sexe par exemple. Cependant son désir est marqué par « l’excès » (hubris) et naturellement porté à succomber aux sept péchés capitaux désignés par G. sous la forme de la « loi de Sept » et de l’expression « Shat-Tchaï-Mernis ».
[Dans l’espérance en l’Etre] Lorsque ce n’est pas l’être humain qui prend l’initiative de désirer des objets extérieurs, et qu’il reste tranquillement installé dans une certaine passivité innocente, c’est parfois le milieu extérieur qui prend l’initiative de s’affirmer en convoitant l’être humain sur un mode problématique, et ce phénomène se produit, comme l’enseigne le mythe égyptien de l’assassinat du pharaon Osiris par son frère Seth jaloux et désireux de régner à sa place, sous la forme des violences infligées à l’être humain par trois facteurs typifiés dans ce mythe 1 et qui menacent l’existence et l’être de ce sujet en le plongeant dans des situations désespérantes. Ces trois facteurs néantissants et désespérants sont les puissants de ce monde, les malfaisants et la mort dont les violences à l’égard de leurs victimes innocentes furent comparées par G. à des « chocs » émis comme facteurs « d’impressions » par le milieu extérieur et situés symboliquement dans l’octave musicale entre les notes si et do.
[Dans la charité du Fils de l’Esprit et de l’Etre] Lorsqu’un être humain pratique la foi en l’Esprit et l’espérance en l’Etre, il est logiquement conduit à devoir transmettre charitablement ces deux vertus théologales salutaires à autrui, soit comme prêtre célébrant les rites, soit comme maître exerçant la direction spirituelle auprès d’autrui, soit comme parent éduquant son enfant au sacré ; mais dans cette opération il est naturellement porté à s’affirmer au détriment de ses dirigés en succombant à la tentation du pouvoir, ce que Platon décrivait comme étant, chez le maître, de la « hargne » et de « l’agressivité » envers ses élèves (Théétète 168 b), problème auquel G. faisait allusion à travers la figure de « l’Idiot Fanfaron ».
La sainte négation
[Dans la foi en l’Esprit] Le caractère désordonné des désirs primesautiers de l’être humain fait naturellement rentrer celui-ci en conflit avec le milieu extérieur qui, en réaction, s’oppose inévitablement à lui de quatre manières possibles en refusant d’exaucer ses désirs irréalisables, en différant d’exaucer ses désirs réalisables et non peccamineux mais mal dirigés, en lui suggérant de ne pas réaliser ses désirs de péchés capitaux, et enfin en signifiant à l’homme qui a succombé à l’un ou à l’autre des sept péchés mortels la sanction de ces derniers, que celle-ci s’avère être un pardon (dans ce cas le sujet échappe à la mort) ou une punition (dans ce cas le sujet meurt physiquement) 2. Quatre manifestations de l’Esprit ou « vents contraires » que Socrate appelait son daimon 3 et qu’à la suite de l’Egypte antique la Bible nomma les « quatre vents » cardinaux de l’Esprit 4, dénomination dont G. s’inspira pour désigner l’Esprit comme « air » qu’il compara aux « chocs » émis par le milieu extérieur et symboliquement placés dans l’octave musicale entre les notes mi et fa.
[Dans l’espérance en l’Etre] Lorsque l’être humain se trouve violenté malgré son innocence par des facteurs qui menacent son existence et son être, il est naturellement et logiquement porté à sombrer dans le désespoir, ce que G. appelait les « émotions négatives » (impatience par manque de résistance ; défaitisme par manque de courage ; vengeance 5 ; passivité négligente et inconsciemment complice envers les facteurs néantissants et désespérants).
table des matières
Avant-propos
I La Tradition, la voie des maîtres et Gurdjieff
II Extériorité et intériorité dans les Récits de Belzébuth
III Gurdjieff et Pythagore
IV La question de l’Atlantide
V Cosmogonie et cosmologie sacrées dans Belzébuth
VI Qu’est-ce que se connaître ?
VII La loi de Sept
VIII L’attelage de l’homme et la notion de Quatrième voie
IX Les trois strates de l’harmonie chez Gurdjieff
X La loi de Trois
XI Le « Je suis »
XII L’arbre inversé
XIII Supplément à mon livre sur les Idiots
XIV Gurdjieff et les danses sacrées
XV Le groupe de la Cordée et Fritz Peters, élèves de Gurdjieff
XVI L’entropie à l’oeuvre chez Jeanne de Salzmann
XVII Actualité de l’enseignement de Gurdjieff
Appendice 1 : Les voyages formateurs de Gurdjieff
Appendice 2 : La carte de l’Egypte avant les sables
Appendice 3 : La confrérie des Sarmoung
Appendice 4 : Les Récits de Belzébuth comme écho et reflet de l’apprentissage de G.
Appendice 5 : Gurdjieff et l’Islam
Appendice 6 : La subversion du gurdjievisme de 1966 à nos jours
Bibliographie