Eckartshausen Le voyage de Kostis
Cette édition présente de larges extraits de l'édition originale et s'enrichit des commentaires de trois auteurs : André Kervella, Nicodème et Antoine Palfroy
Retraçons à grands traits dans quel contexte historique et politique cette oeuvre très peu connue d'Eckartshausen vit le jour.
On assiste durant tout le 18e siècle et dans toute l'Europe à une véritable mode égyptienne ou égyptomanie, dont voici quelques exemples: 1751: Rameau écrit un ballet-opéra «La naissance d'Osiris», 1791; Création de la Flûte Enchantée de Mozart : 1795 : l'écrivain mystique Eckartahaussen fait paraître son roman «le Voyage de Kosti » dans lequel le héros, fils d'un prince indien suit un fabuleux voyage initiatique jusqu'à la Grande Pyramide d'Egypte.
Certes, "Le voyage de Kostis" est celui qui mène l'impétrant qui frappe à la porte du Temple mais aussi à toute réelle initiation.
Premier extrait :
"Alors le vieillard ordonna aux douze squelettes de poser les trois cercueils à terre, l’un à côté de l’autre. Il lit un signe, et les squelettes disparurent.
Le V. — Tu t’es beaucoup engagé, mais comment veux-tu qu’un mort puisse ressusciter un autre mort ? Est-ce que tu ne comptes pas aussi parmi eux ? Réfléchis à ce que tu es. — Un homme. — Et quel est le sort des hommes ici-bas ?
L’homme est né dans le péché, c’est-à-dire il a, dès sa naissance, plus de penchant pour la complexité que pour la simplicité, pour l’extérieur que pour l’intérieur, pour le matériel que pour le spirituel. Son intelligence se corrompt par des erreurs, son cœur par des convoitises et des passions, et son activité par le mauvais exemple du vice.
Cet état s’empire encore par son tempérament, son éducation, sa position, et les circonstances dans lesquelles le hasard l’a placé.
À sa naissance, il apporte les fautes de ses antécédents, comme un héritage moral, il suce avec le lait, d’une nourrice étrangère les germes des penchants corrompus.
La courtoisie dissimule les erreurs de son intelligence, la concupiscence les égarements de son cœur.
La jeunesse et l’âge mûr sont le temps dans lequel se développent tous les mauvais germes. Son état moral et physique est attaqué de tous côtés ; il sent le chagrin, cherche une aide, et ne la trouve nulle part. Ici, les savants lui imposent des idées, au lieu de le conduire vers la Vérité ; là on retire les biens réels du contentement, en lui montrant des biens imaginaires qu’il cherche en vain à atteindre. On lui voile la vue de la pure Vérité, on bande ses yeux clairs avec le bandeau des habitudes et des préjugés, on le conduit vers le précipice sans bornes.
Ainsi l’homme s’approche de la fin de sa vie dans une perpétuelle agitation, et l’impitoyable sort pose le sceau noir sur le décret qui l’a condamné à venir dans cette vallée de larmes.
Un traitement médical, contraire à la nature, torture son corps par ignorance méthodique, consolation insuffisante ; ou bien des cérémonies vides tourmentent son esprit, alors qu’il sent sa haute destination et cherche le chemin qu’il devrait parcourir.
Comme il est triste de penser que les mêmes éléments forment notre corps, que notre esprit souffre du même poids moral et physique, que les mêmes fautes et les mêmes désordres sont aussi notre partage. Les mêmes tyrans qui ont sacrifié nos frères, nous sacrifient, et nous leur arrachons les outils de l’injustice, pour dérober aux autres, à notre tour, le repos et le contentement.
Dieu du ciel ! Ainsi est composée l’atmosphère dans laquelle nous vivons ; tout nous empoisonne. Erreurs et préjugés, notre intelligence, Concupiscence et passions, notre cœur.
Crimes et vices, notre essence !
Qui ose, à cette pensée, respirer encore l’air qui l’environne ? — Ne tremble-t-on pas de lever les yeux, de se mouvoir et de sentir ? Et pourtant, un grand nombre d’hommes vit tranquillement, se laisse entraîner, comme le courant entraîne un corps sans vie !
Tu vis dans cette atmosphère. Le sombre souterrain qui l’entoure est l’écorce de l’erreur, des préjugés, des passions et des vices de l’homme,
Les squelettes que tu as vus sont ceux qui conduisent au tombeau ceux qu’ils ont tués, avec la morne lueur de leurs sophismes. Dans ces cercueils gisent l’entendement, le cœur ou la volonté, et l’activité, assassinés et morts.
Les préjugés sont les assassins de l’entendement.
Les erreurs, les assassins du cœur, et les passions, les assassins des actions. Je t’engage à les combattre, et quand ton intelligence verra la Vérité dont je te parle, ces morts s’éveilleront de leur sommeil, et tu seras digne de contempler la Lumière vivante.
Le vieillard frappa trois fois, avec un marteau, sur chaque cercueil ; ils s’ouvrirent, et trois formes, d’une angélique beauté, se levèrent dans leurs vêtements éthérés. Vois, Kosti, poursuivit-il, combien grande est la vocation de l’homme ! Combien splendide est la force qui sommeille en nous ! Notre intelligence, notre volonté, notre activité, peuvent former de telles figures angéliques, quand nous sommes fidèles à la voix de la Divinité.
Vois, Kosti ! Morte est la matière avec laquelle est fait ce marteau !
— Morte, la matière des cercueils où les forces sommeillent ; mais ma force suscite hors de la matière morte, le Son spirituel qui gisait enfermé, il perce ta prison dans laquelle il était enchaîné, et passe dans le Royaume des Sons. Ainsi se dégagent les forces divines qui sommeillent dans l’enveloppe mortelle de ton corps, et indépendantes, elles suivent les Lois des plus hautes Forces."
Le V. — Tu t’es beaucoup engagé, mais comment veux-tu qu’un mort puisse ressusciter un autre mort ? Est-ce que tu ne comptes pas aussi parmi eux ? Réfléchis à ce que tu es. — Un homme. — Et quel est le sort des hommes ici-bas ?
L’homme est né dans le péché, c’est-à-dire il a, dès sa naissance, plus de penchant pour la complexité que pour la simplicité, pour l’extérieur que pour l’intérieur, pour le matériel que pour le spirituel. Son intelligence se corrompt par des erreurs, son cœur par des convoitises et des passions, et son activité par le mauvais exemple du vice.
Cet état s’empire encore par son tempérament, son éducation, sa position, et les circonstances dans lesquelles le hasard l’a placé.
À sa naissance, il apporte les fautes de ses antécédents, comme un héritage moral, il suce avec le lait, d’une nourrice étrangère les germes des penchants corrompus.
La courtoisie dissimule les erreurs de son intelligence, la concupiscence les égarements de son cœur.
La jeunesse et l’âge mûr sont le temps dans lequel se développent tous les mauvais germes. Son état moral et physique est attaqué de tous côtés ; il sent le chagrin, cherche une aide, et ne la trouve nulle part. Ici, les savants lui imposent des idées, au lieu de le conduire vers la Vérité ; là on retire les biens réels du contentement, en lui montrant des biens imaginaires qu’il cherche en vain à atteindre. On lui voile la vue de la pure Vérité, on bande ses yeux clairs avec le bandeau des habitudes et des préjugés, on le conduit vers le précipice sans bornes.
Ainsi l’homme s’approche de la fin de sa vie dans une perpétuelle agitation, et l’impitoyable sort pose le sceau noir sur le décret qui l’a condamné à venir dans cette vallée de larmes.
Un traitement médical, contraire à la nature, torture son corps par ignorance méthodique, consolation insuffisante ; ou bien des cérémonies vides tourmentent son esprit, alors qu’il sent sa haute destination et cherche le chemin qu’il devrait parcourir.
Comme il est triste de penser que les mêmes éléments forment notre corps, que notre esprit souffre du même poids moral et physique, que les mêmes fautes et les mêmes désordres sont aussi notre partage. Les mêmes tyrans qui ont sacrifié nos frères, nous sacrifient, et nous leur arrachons les outils de l’injustice, pour dérober aux autres, à notre tour, le repos et le contentement.
Dieu du ciel ! Ainsi est composée l’atmosphère dans laquelle nous vivons ; tout nous empoisonne. Erreurs et préjugés, notre intelligence, Concupiscence et passions, notre cœur.
Crimes et vices, notre essence !
Qui ose, à cette pensée, respirer encore l’air qui l’environne ? — Ne tremble-t-on pas de lever les yeux, de se mouvoir et de sentir ? Et pourtant, un grand nombre d’hommes vit tranquillement, se laisse entraîner, comme le courant entraîne un corps sans vie !
Tu vis dans cette atmosphère. Le sombre souterrain qui l’entoure est l’écorce de l’erreur, des préjugés, des passions et des vices de l’homme,
Les squelettes que tu as vus sont ceux qui conduisent au tombeau ceux qu’ils ont tués, avec la morne lueur de leurs sophismes. Dans ces cercueils gisent l’entendement, le cœur ou la volonté, et l’activité, assassinés et morts.
Les préjugés sont les assassins de l’entendement.
Les erreurs, les assassins du cœur, et les passions, les assassins des actions. Je t’engage à les combattre, et quand ton intelligence verra la Vérité dont je te parle, ces morts s’éveilleront de leur sommeil, et tu seras digne de contempler la Lumière vivante.
Le vieillard frappa trois fois, avec un marteau, sur chaque cercueil ; ils s’ouvrirent, et trois formes, d’une angélique beauté, se levèrent dans leurs vêtements éthérés. Vois, Kosti, poursuivit-il, combien grande est la vocation de l’homme ! Combien splendide est la force qui sommeille en nous ! Notre intelligence, notre volonté, notre activité, peuvent former de telles figures angéliques, quand nous sommes fidèles à la voix de la Divinité.
Vois, Kosti ! Morte est la matière avec laquelle est fait ce marteau !
— Morte, la matière des cercueils où les forces sommeillent ; mais ma force suscite hors de la matière morte, le Son spirituel qui gisait enfermé, il perce ta prison dans laquelle il était enchaîné, et passe dans le Royaume des Sons. Ainsi se dégagent les forces divines qui sommeillent dans l’enveloppe mortelle de ton corps, et indépendantes, elles suivent les Lois des plus hautes Forces."
Nous retrouvons dans cet extrait, le regard de louis claude de Saint-Martin sur la matière et notre céleste destinée...Eckartshausen fut proche des idées de Louis Claude de Saint Martin et de J.Boehme.
2ème extrait :
Lorsque Kosti eut pensé quelque temps à tout ce qu'il avait rencontré jusque-là, l'ermite s'approcha de lui. — Kosti, commença-t-il, tu cherches la Sagesse, elle est ce que tu peux chercher ici-bas de plus élevé. Les Dieux t'ont conduit par de miraculeux chemins ;
Abandonne-toi à leur direction, et mérite-la par de purs efforts vers la Vérité.
La soif du Bien,
La soif du Vrai,
et la soif du Beau,
git dans l'essence de l'homme. Elle est le mobile de la réunion avec l'Unité, qui est la source du Bien, du Vrai et du Beau. Mais les erreurs de notre intelligence sont cause que nous cherchons fréquemment le Bien là où il n'est pas. Le Bien est seulement dans l'Unité, le Vrai dans l'intérieur, et nous le cherchons à l'extérieur. Le Beau est uniquement dans le spirituel, et nous le cherchons dans les choses matérielles !
C'est pourquoi tous nos égarements sont la cause de nos malheurs, de notre mécontentement et de nos chagrins ici-bas.
Tout ce que tu vois ici, Kosti, repose comme idée, de toute éternité, dans la pure Intelligence de l'Unité.
L'existence de cet univers est la réalisation de cette Idée, d'après les Lois immuables de l'Unité.
Aussi longtemps que l'homme considère cette réalisation d'après les Lois de l'Unité, il trouve partout le Bien ; il voit partout Dieu dans ses œuvres ; mais quand il perd son entendement, de toutes sortes de manières, il en résulte nécessairement des erreurs ; donc, il cherche à l'extérieur ce qu'il devrait chercher dans l'intérieur. Il ne prend plus les conceptions de son intellect dans l'Intelligence pure, mais seulement dans la réalisation ; ainsi son Arne rassemble des images dont il ignore la formation.
Quand l'intelligence perd sa Loi, la volonté perd aussi la sienne, car la volonté, ou activité personnelle de l'homme, doit être simplement la pure Idée de l'Intelligence, réalisée sous la Loi de l'Unité, Le cœur perd aussi la base de ses actions; alors il ne peut plus reconnaitre le vrai Bien, il cherche le faux, et ses convoitises se limitent à la possession des choses extérieures, dans lesquelles il ne trouve jamais ni assouvissement, ni satisfaction, parce qu'elles sont soumises à la Loi du Temps et de l'Instabilité..
Abandonne-toi à leur direction, et mérite-la par de purs efforts vers la Vérité.
La soif du Bien,
La soif du Vrai,
et la soif du Beau,
git dans l'essence de l'homme. Elle est le mobile de la réunion avec l'Unité, qui est la source du Bien, du Vrai et du Beau. Mais les erreurs de notre intelligence sont cause que nous cherchons fréquemment le Bien là où il n'est pas. Le Bien est seulement dans l'Unité, le Vrai dans l'intérieur, et nous le cherchons à l'extérieur. Le Beau est uniquement dans le spirituel, et nous le cherchons dans les choses matérielles !
C'est pourquoi tous nos égarements sont la cause de nos malheurs, de notre mécontentement et de nos chagrins ici-bas.
Tout ce que tu vois ici, Kosti, repose comme idée, de toute éternité, dans la pure Intelligence de l'Unité.
L'existence de cet univers est la réalisation de cette Idée, d'après les Lois immuables de l'Unité.
Aussi longtemps que l'homme considère cette réalisation d'après les Lois de l'Unité, il trouve partout le Bien ; il voit partout Dieu dans ses œuvres ; mais quand il perd son entendement, de toutes sortes de manières, il en résulte nécessairement des erreurs ; donc, il cherche à l'extérieur ce qu'il devrait chercher dans l'intérieur. Il ne prend plus les conceptions de son intellect dans l'Intelligence pure, mais seulement dans la réalisation ; ainsi son Arne rassemble des images dont il ignore la formation.
Quand l'intelligence perd sa Loi, la volonté perd aussi la sienne, car la volonté, ou activité personnelle de l'homme, doit être simplement la pure Idée de l'Intelligence, réalisée sous la Loi de l'Unité, Le cœur perd aussi la base de ses actions; alors il ne peut plus reconnaitre le vrai Bien, il cherche le faux, et ses convoitises se limitent à la possession des choses extérieures, dans lesquelles il ne trouve jamais ni assouvissement, ni satisfaction, parce qu'elles sont soumises à la Loi du Temps et de l'Instabilité..