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René Guénon et la Tradition primordiale
Jean-Marc Vivenza
La nature de la fameuse « Tradition primordiale » qui occupe une place centrale à l’intérieur de l’œuvre de René Guénon, de par les nombreuses questions qu’elle soulève, pose d’évidentes difficultés dans ses principales affirmations pour ceux qui sont rattachés aux voies initiatiques issues de l’Illuminisme chrétien.
En effet, la conception de René Guénon s’oppose directement à la doctrine du Régime Écossais Rectifié, fondé par Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824), qui rappelle que, dès l’origine, de par la division religieuse qui s’opéra entre Caïn et Abel, il n’y a pas une « Tradition », mais deux, ce qui signifie deux « transmissions » antagonistes, deux « initiations » et deux « dépôts spirituels » qui portent, certes, le même nom (tradition), mais n’ont pas du tout le même contenu, ni la même finalité ; la tradition de Caïn ne pouvant se réclamer que d’une origine babélienne qui, outre son caractère réprouvé, ne possède qu’une antériorité limitée à la période post-diluvienne, alors que seule la Tradition des « élus de l’Éternel » par Abel, est en mesure de se prévaloir du titre de « primitive ».
De ce fait, le concept guénonien de « Tradition primordiale », de par son aspect univoque problématique, obligeait à ce que soit enfin effectué un examen attentif des affirmations soutenues par René Guénon à la lumière de l’ésotérisme chrétien, afin de comprendre pourquoi le Régime Écossais Rectifié, s’appuyant sur l’enseignement de Martinès de Pasqually (+ 1774) – suivi en cela par les disciples de Louis-Claude de Saint-Martin (1743-1803) -, ne détient aucunement sa légitimité d’un « rattachement » à une tradition placée sous l’autorité d’un prétendu « Roi du Monde » régnant à l’intérieur du royaume souterrain de l’Agarttha, mais, de par sa fidélité à l’authentique « Tradition divine », celle qui, révélée et sainte, œuvre silencieusement depuis Abel, Seth, Énoch, Elie, Noé, Melchisédech, Moïse et Zorobabel jusqu’au Messie, à la contemplation et méditation des mystères célestes, travaillant, avec amour, à la défense de la sainte religion du Divin Réparateur : ad Majorem Dei Gloriam.